« Pourquoi, donc, quittons-nous ce lieu idéalement beau et calme et riche en champignons ? » s?interroge Freud, alors qu?il séjourne, en compagnie de sa belle-soeur Minna, dans une petite ville du Tyrol du Sud en septembre 1900. « Simplement parce qu?il ne nous reste qu?une semaine à peine, et que notre coeur, comme nous l?avons constaté, tend vers le Sud, vers les figues, les châtaignes, le laurier, les cyprès, les maisons ornées de balcons, les marchands d?antiquités
»
Le Sud ? Ce sera d?abord l?Italie. Rome, bien sûr, ses entrailles et ses ruines. Mais bientôt, plus au sud encore, la route de toutes les splendeurs, celle de Naples, de Pompéi, de Ravello, de Positano, de la
Costiera amalfitana, de Palerme et d?Agrigente. Prodigieux territoires que Freud découvre la quarantaine venue, lorsque sa situation matérielle l?autorise enfin à voyager. S?instaure alors le rituel : chaque année, fin août ou début septembre, lorsque sa femme et ses six enfants ont pris leur quartier d?été, il s?échappe quelques semaines à l?étranger.
De cette passion pour le voyage témoignent les 189 cartes postales et les 56 lettres ici réunies en un volume splendide, vibrant de découvertes fastueuses, de la beauté des sites, de l?émotion au quotidien. Freud observe, note, décrit, s?enthousiasme et raconte à son interlocuteur les surprises du jour. Le plus souvent, c?est à sa femme ou à l?un de ses enfants qu?il s?adresse. Son Baedeker à la main, il arpente les chemins de Sicile, déambule dans Rome, goûte aux plaisirs de la bouche et de l?âme.
Viendra bientôt le tour d?Athènes. Mais il y aura aussi l?Angleterre et les Etats-Unis. Car si le coeur de Freud tend vers le Sud, sa raison le ramène inexorablement au Nord
En septembre 1923, c?est avec sa fille Anna qu?il se rend à Rome pour la septième fois. Voyage emprunt de nostalgie, visites haletantes des musées. Freud souffre déjà du cancer qui l?emportera, loin du Sud, à Londres, chassé par le nazisme, alors que le monde d?hier a bel et bien vécu. Et ce voyage à Rome, sûrement le sent-il, est pour lui le dernier.
Avec 152 reproductions in-texte.
Traduit de l?allemand par Jean-Claude Capèle.
Présentation de Christfried Tögel, avec la collaboration de Michael Molnar.
Préface d?Elisabeth Roudinesco.
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