Un armorial est un recueil d’armoiries. Celles-ci peuvent se définir comme des emblèmes en couleurs, propres à un individu, à une famille ou à une collectivité et soumis dans leur composition à des règles particulières qui sont celles du blason. C’est l’existence de ces règles – au reste peu nombreuses, moins complexes qu’on ne le croit généralement, et dont la principale concerne l’emploi des couleurs – qui différencie le système héraldique européen de tous les autres systèmes d’emblèmes, antérieurs ou postérieurs.
L’apparition des armoiries en Occident dans la première moitié du XIIe siècle est d’abord liée à une cause matérielle : l’évolution de l’équipement militaire. Les transformations du casque et du haubert rendant le chevalier méconnaissable à la bataille et au tournoi, celui-ci prend peu à peu l’habitude de faire peindre sur la grande surface de son bouclier des figures (animales, végétales, géométriques) aidant à le reconnaître au cœur de la mêlée. On peut parler d’armoirie à partir du moment où un même chevalier fait constamment usage, pendant une longue période de sa vie, des mêmes figures et des mêmes couleurs, et où quelques principes de composition, simples mais rigoureux, interviennent pour les mettre en forme. Toutefois cette cause matérielle n’explique pas tout. L’apparition des armoiries se rattache plus profondément au nouvel ordre social qui touche la société occidentale à l’époque seigneuriale. Comme les noms patronymiques ou comme les attributs vestimentaires, elle apporte des signes d’identité nouveaux à une société en train de se réorganiser.
D’abord individuelles et réservées aux seuls combattants, les armoiries deviennent progressivement héréditaires. Puis, dans le courant du XIIIe siècle, leur emploi s’étend aux femmes, aux ecclésiastiques, aux habitants des villes, aux artisans et même, dans certaines régions, aux paysans (Normandie, Flandre, Angleterre méridionale, Suisse) ; enfin, un peu plus tard, aux personnes morales : villes, corps de métiers, communautés religieuses, institutions et administrations diverses. L’église, d’abord méfiante envers ce système entièrement élaboré en dehors de son influence – comme le souligne l’emploi, dès l’origine, de la langue vernaculaire pour décrire des armoiries – s’y introduit pleinement à partir du milieu du XIIIe siècle. Dès lors, les églises et les monuments ecclésiastiques deviennent de véritables “musées” d’armoiries. On en trouve sur les sols, sur les murs, sur les verrières, sur les plafonds, sur les objets et les vêtements du culte. L’art de la fin du Moyen Age et celui de l’époque baroque leur accordent une place considérable.
L’apogée du port des armoiries en Europe occidentale se situe entre le XVe et le XVIIe siècle. Sur le plan socio-juridique, il convient ici de corriger une erreur fort répandue mais qui ne repose sur aucune réalité historique : la limitation à la noblesse du droit aux armoiries. A aucun moment, dans aucun pays, le port d’armoiries n’a été l’apanage d’une classe sociale. Chaque individu, chaque famille, chaque groupe ou collectivité a toujours et partout été libre d’adopter les armoiries de son choix et d’en faire l’usage privé qu’il lui plaisait, à la seule condition de ne pas usurper celles d’autrui. Toutefois, si tout le monde peut porter des armoiries, tout le monde n’en porte pas. Leur usage va décroissant du haut en bas de l’échelle sociale, un peu comme celui de la carte de visite aujourd’hui.
Título : L'armorial d'Auvergne Bourbonois et Forestz de Guillaume Revel
EAN : 9782848192956
Editorial : Editions Créer
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